mercredi 27 juin 2018

Utah – des Mormons et des cailloux – du 5 au 12 juin

Ne pas travailler pendant 8 mois est fatigant : nous avons donc pris une semaine de vacances pour aller visiter en voiture quelques parcs nationaux au sud de l’état de l’Utah.

Nous partons de Salt Lake City, la capitale de l’état de l’Utah, là où nous avait déposé le train la veille. 
Salt Lake City, c’est un peu l’Albertville des USA :
c’est une ville entourée de montagnes qui a accueilli les Jeux Olympiques d’hiver en 2002 (soit 10 ans seulement après Albertville). 
La comparaison s’arrête là, car Salt Lake City, c’est une grosse ville de plus d’un million d’habitants, des gratte-ciels, un aéroport international et…un lac salé comme son nom l’indique, le tout perché à 1200 m d’altitude. 

La ville a été fondée par les membres de (inspirez à fond) l’« Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours », une branche de chrétiens qui croient en une Vérité différente de la Vérité en laquelle croient les autres chrétiens, ce qui leur a valu d’être persécutés et massacrés au XIXème siècle, les poussant à se réfugier en Illinois puis dans les montagnes désertiques de l’Utah.

N’en déplaise à leurs détracteurs, les Mormons ont prospéré religieusement et économiquement et sont maintenant un courant important aux USA et possèdent quelques dizaines de milliards de dollars d’actifs (notamment perçus auprès des fidèles qui versent une dîme).


A Salt Lake City, dans l’Utah en général et dans les états voisins, le mormonisme est très présent et les temples et églises font légion.

Un cycliste (non mormon) rencontré sur la route nous indiquait que « 80% de la population était de confession mormone », faisant de l’Utah un état conservateur avec de fortes valeurs morales difficilement solubles dans la modernité (chasteté, mariage obligatoire).

Vous avez déjà dû croiser des Mormons en plein mission d’évangélisation en France : deux jeunes gens en costard-cravate avec un petit badge noir, qui parlent un français impeccable avec un léger accent américain (attention, ce ne sont pas des témoins de Jéhovah - comme pour les champignons, les confusions sont possibles).


Une fois notre voiture récupérée et les vélos chargés, nous fonçons à travers les montagnes désertiques de l’Utah pour rejoindre le sud de l’état, non loin de la frontière avec les états du Nevada et de l’Arizona.


Le sud de l’Utah, c’est une combinaison magique de roches facilement érodables (grès, calcaires, argiles) et d’un climat sec. Les rares précipitations ont eu le temps de grignoter ces immenses épaisseurs de roches, mais ont eu la politesse d’en laisser un peu pour dessiner un relief accidenté unique constitué de larges plateaux déchirés de gorges profondes et parsemés çà et là de promontoires rocheux.


Ces gorges, ou « canyons » dans le jargon local, sont de renommée internationale et sont protégées sous la forme de Parc Nationaux. Les Parcs Nationaux sont des territoires immenses mais contrôlés et dont l’accès est réglementé (et très souvent payant), leur conférant cet arrière-goût de grand Disneyland naturel.


Nous avons visité trois des parcs nationaux de la région : Zion, Canyonlands et Arches. Pour chacun, l’entrée est payante, environ 35$, mais un pass annuel à 80$ donne une bonne fois pour toutes l’entrée pour nous deux dans tous les parcs nationaux des USA (très pratique pour nous qui en avons un certain nombre sur notre liste, détails sur le pass à venir dans un article indépendant).

A chaque parc sa marque de fabrique :
  • Zion (« la Cité de Dieu » dans la Bible, nom donné par le mormon qui l’a découverte, évidemment) : c’est une vallée profonde taillée dans une roche rougeoyante, parcourue d’une rivière qui sort fraîchement de gorges dont les parois verticales atteignent jusqu’à 500m de haut. On peut se balader dans la rivière, ce qui devient une randonnée rafraichissante de plusieurs heures avec les pieds (et parfois la taille) constamment dans l’eau. Cette balade est aussi une très belle opportunité de se tordre la cheville ou le pied, expérimenté par Aymeric, limitant sa mobilité dans les autres parcs… C’est aussi crève-cœur de piétiner avec d’autres centaines de personnes tous les jours ces milieux naturels, heureusement plus on remonte la rivière, plus on largue de personnes et en remontant un petit affluent moins facilement accessible, on constate la richesse des écosystèmes de ces canyons ;






  • Canyonlands : c’est un plateau de plusieurs dizaines de kilomètres carrés qui a été patiemment érodé par le passage des rivières Colorado et Green River, créant un gigantesque ensemble de gorges multicolores, particulièrement belles aux lever et coucher du soleil. Si vous vous levez tôt vous aurez peut-être la chance de trouver une place dans un des quelques campings situés au milieu du parc (attention seul accès à l’eau au Centre des Visiteurs à 23km), grandiose vue sur la Voie Lactée garantie ! Nous avons également sauté de notre tente au petit matin pour aller jouer des coudes avec des dizaines de touristes, principalement coréens, pour aller admirer le lever de soleil traversant une arche du parc et la mitrailler de photos ;





  • Arches : comme son nom l’indique, est surtout célèbre pour ses arches naturelles creusées dans le grès, faisant jusqu’à plusieurs dizaines de mètres de haut, mais d’autres monuments naturels font le plaisir des touristes.








Comme toujours, il y a un envers du décor dans ces écrins de perfection que sont les parcs nationaux. Avant de devenir un haut-lieu du tourisme en 1964, le territoire de Canyonlands et ses abords ont été perforés de toute part pour la recherche d’uranium. On était à l’époque du projet militaro-scientifique dit « Manhattan », dont la grande œuvre a été la destruction d’Hiroshima et de Nagasaki par le feu nucléaire en 1945. Le début de la guerre froide a ensuite entraîné une course à l’uranium pour fabriquer des bombes atomiques, et certaines zones comme Canyonlands ont connu une véritable ruée jusqu’à… l’effondrement des prix de l’uranium, tous les mineurs sont alors partis aussi vite qu’ils étaient venus ! 
Ne restent aujourd’hui que des puits de mine instables que certains tentent de sillonner au péril de leur vie, et des usines d’enrichissement d’uranium qui sont en cours de « dépollution » (la dépollution consistant à mettre les déchets de leur démolition dans un autre endroit, des bassins « étanches » sous une couche de terre).

Intéressant aussi de voir ces puits de pompage de pétrole aux portes du parc : un des rangers (employés en charge de la gestion du parc - prononcer « rande-jeur ») nous avouait que la production d’un des puits avait brutalement augmenté il y a quelques années, et qu’ils avaient pris peur pour l’avenir de leur parc. Heureusement, la production avait ensuite diminué très rapidement. Avec le rigolo qu’ils ont au pouvoir actuellement, cela ne leur prendrait qu’un tweet pour trancher entre la production de pétrole et la pérennité d’un parc naturel…

Parce que des photos valent mieux que de longs discours, nous vous invitons à regarder l’album photo qui correspond à cette traversée du désert (certaines photos sont affublées d’un commentaire explicatif en bas de page).
Parmi les photos de touristes sur fond de rocaille, vous y trouverez quelques clichés étranges d’objets divers et variés et de figures trampolinesques. Tout cela vient d’un camping insolite dans un ranch que Google Maps nous a dégoté. Le propriétaire, Ben, maître Jedi de scoutisme, a construit un campement pour amuser petits et grands au milieu des rochers rouges : tyrolienne, accrobranche, trampoline, manège intergalactique, roue géante de hamster, tout est récup’ ou fait-maison. 
Ben nous a fait une visite guidée de son « cabinet de curiosités », rassemblant un ensemble d’objet locaux allant de l’attrape-rêve indien à la mâchoire de coyote en passant par l’empreinte de dinosaure figée dans la pierre. Il rassemble aussi des photos de valeureux militaires et sportifs (ainsi qu’une photo de sa fratrie de 10 garçons, idéale pour jouer un match de basket).    





Un conseil pratique pour finir : prenez toujours l’assurance qui va avec la location de voiture, cela vous permettra d’avoir une intervention gratuite au milieu de nulle part si par malheur vous coincez vos clefs à l’intérieur de la voiture (surtout quand il est 19h, que vous venez d’arriver au camping, et que l’ensemble de vos affaires est resté à l’intérieur).


Toutes les bonnes fainéantises ayant une fin, on retourne à Salt Lake City rendre notre voiture et on enfourche à nouveau nos vélos (qui commençaient à devenir jaloux). La route s’élève dans les prochaines étapes, on dépasse les 2000m pour aller voir les grizzlis, orignaux et autres bêbêtes !









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