vendredi 15 juin 2018

Je suis allé à New-York avec toi – du 26 au 31 mai

Depuis la zone de pêche et de chasse des autochtones Lenape et la colonie néerlandaise de feue la Nouvelle-Amsterdam, jusqu’au tumulte bouillonnant d’aujourd’hui, les hommes ne s’y sont jamais trompé et ont tout donné pour elle : New-York est la ville des excès, des folies, des contraires. La ville des portes ouvertes sur le monde et des communautés qui ne se croisent jamais, des salaires stratosphériques des financiers de Wall Street aux sans-domiciles errant dans les sous-sols des gares, la capitale de l’ONU et le mausolée du plus grand attentat terroriste de tous les temps.

New-York était donc une étape immanquable de notre voyage, une autre parenthèse citadine dans ce périple de verdure et de nature.



Tout d’abord, profitons de cet article pour remercier à nouveau Christina et sa famille pour son hospitalité et sa générosité, et sans qui notre séjour n’aurait pas été aussi riche et immersif, pour d’évidentes raisons économiques, les coûts d’hébergement étant faramineux à New-York. Nous avons en effet eu la chance de rencontrer Christina le jour de notre départ de Lyon, à l’aéroport, et elle nous a alors invités à New-York dans son bel appartement en bordure de Central Park, invitation que nous ne pouvions pas refuser !



New-York et ses environs sont un ensemble d’îles, de presqu’îles et de côtes morcelées qui définissent autant de quartiers dont les noms doivent certainement vous évoquer quelque chose : Manhattan (là où tout a commencé, et là où tout se passe), Brooklyn (quartier résidentiel en pleine gentrification, atteignable depuis Manhattan par le pont du même nom, entre autres), Jersey City (presqu’île à l’ouest de Manhattan, en train de devenir une autre forêt de gratte-ciels) , Long Island (île plus bucolique et destination phare pour les locaux qui veulent se mettre au vert et faire un tour à la plage).



Nous avons passé le plus clair de notre temps entre Jersey City (nous y avons logé trois nuits), Manhattan et Brooklyn, entre visite de musées et monuments et, plus courageux encore, expéditions en vélo dans la jungle urbaine.








Le cycliste est une espèce en pleine croissance dans les rues de New-York, mais cette population est constamment menacée par les multiples prédateurs nichant au coin des buildings : « taxi et Uber coupeurs de route », « livreurs en vélos électriques sans phare la nuit  à contre-sens la plupart du temps », « touristes perdus la truffe au vent grâce aux vélos en libre-service de la ville », « piétons pressés grilleurs de priorité », « trottinettes électriques véloces » et « nids d’autruche » sont autant de périls que nous avons dû combattre pour survivre dans ce milieu hostile.
Même si la ville de New-York a visiblement mis en œuvre de gros moyens pour les cyclistes (réseau de pistes cyclables à deux voies le long des berges de l’Hudson et de l’East River, voies cyclables sur les ponts de Williamsburg et Brooklyn), des efforts restent à faire pour irriguer l’intérieur des quartiers principaux et pour harmoniser la conduite entre différents véhicules. Et il faudra certainement un jour, y compris dans les villes européennes, réglementer tout ce trafic de vélo et de trottinettes à muscles ou à moteur, quitte à passer par de la répression.




La Grosse Pomme (l’origine précise de ce surnom n’est pas connue, chacun y va de son commentaire. La version qui nous plaît le plus est celle de l’argot du jazz, qui désignait les « pommes » comme les représentations que donnaient au jour le jour les jazzmen. Jouer à New-York, c’était la « grosse pomme » car un synonyme de succès) est une ville bigarrée.




D’abord désignée Menatey par les indiens Lenape, elle a été colonisée par les néerlandais qui la leur ont achetée pour trois clopinettes en 1626, puis, zone économiquement et militairement stratégique, elle a fini dans l’escarcelle des anglais et enfin des américains une fois ceux-ci devenu un vrai pays à la fin du 18ème siècle. Depuis ses débuts, la ville est une terre d’immigration, que ce soit un lieu d’implantation ou simplement une porte d’entrée vers les USA en général. A travers les siècles, ce sont des millions d’européens, puis d’asiatiques et d’africains qui ont débarqué dans le port, rêvant d’une vie meilleure, de pépites d’or, ou simplement de liberté.

Le centre d’immigration d’Ellis Island est le lieu emblématique de cette immigration américaine. Débordés par les arrivés au 19ème siècle, les USA ont mis en place un système industriel d’accueil des migrants, le tout implanté sur l’îlot d’Ellis Island, à portée de rames des côtes de Manhattan. Entre 1820 et 1957, ce ne sont pas moins de 12 millions de personnes (principalement européens, russes et israéliens) qui y ont glané leur ticket d’entrée pour la concrétisation de leur rêve américain.
Pour cela, après une traversée de l’Atlantique dans les cales des paquebots pour les moins fortunés, les migrants devaient passer une batterie de tests médicaux et des interrogatoires prouvant qu’ils ne constituaient pas une menace pour le pays. En tout, seuls 2% des migrants se sont vu refuser l’entrée, ce qui représente tout de même plusieurs centaines de milliers de malheureux qui ont dû retourner dans le pays qu’ils avaient fui (maigre consolation, on leur offrait le billet retour)…
Fermé en 1954 (les importantes migrations européennes s’étant achevées, et les arrivées se faisant à partir de cette date par avion plutôt que par bateau), le centre a été complètement laissé à l’abandon pendant plusieurs décennies, avant d’être rénové dans son état des années 1920, notamment grâce aux donations d’associations d’anciens migrants.
Les noms de tous les migrants ayant transité par l’île sont maintenant gravés sur un long mur de métal ondulant sur les pelouses de l’île : on y a repéré une « Duliere Family » et quelques « Beauchamp » .

Attention : le paragraphe suivant est fortement teinté de chauvinisme. Les plus patriotes d’entre vous ne pourront retenir une larme à l’idée de cette grande nation que fut la France.

Imaginez-vous migrant au début du 20ème siècle : fuyant les bolchéviques de votre Russie natale, ou vos oppresseurs antisémites, qu’auriez-vous vu en entrant dans le port de New-York en bateau, après d’innombrables journées de traversées dans la crasse et la chaleur des chaudières à vapeur ? Quelle aurait été ce phare à l’horizon, cette lumière qui vous a fait quitter sans regret votre pays d’origine ? Il s’agit évidemment de l’œuvre du Français Bartholdi, la fameuse « Liberté éclairant le Monde », plus communément appelée Statue de la Liberté ! Construite en 1886, on oublie fréquemment qu’un autre français encore plus connu, un certain Gustave Eiffel, affutant son génie pour sa prochaine Dame de Fer, a conçu la structure interne de la Statue de la Liberté. Sans lui, les rêves de Bartholdi seraient restés de belles gravures sur du papier jauni…






La statue est censée représenter la liberté dont les USA sont le synonyme : un état tout neuf qui a su se défaire de son oppresseur anglais. Dans ses bras, la statue de cuivre porte les tablettes de la déclaration d’indépendance des Etats-Unis (4 juillet 1776, Fête Nationale américaine, date à retenir pour votre prochaine partie de Trivial Pursuit).
On rajoute un peu de franchouillardise à ce paragraphe en indiquant que le piédestal de la statue de la liberté est posé sur un ancien fort militaire construit en étoile, issu du génie militaire de l’architecte militaire Français Vauban.

Cette statue est donc le plus français des monuments New-Yorkais !

Petits bémols dans cette effusion de liberté et de droits de l’homme :
·      les femmes n’étaient cordialement pas invitées lors de l’inauguration de la statue, certaines ont protesté sur des barques autour de l’île le jour J;
·      les populations noires discriminées ont toujours accueilli avec amertume ce symbole d’une liberté à deux vitesses (rappelons que la marche vers l’égalité des droits civiques entre Noirs et Blancs aux Etats-Unis n’a réellement porté ses fruits qu’à partir des années 1960, la Statue avait alors déjà fêté ses 80 ans !).

Toutes ces vagues migratoires ont constitué le tissu new-yorkais. Ici, pas d’intégration « à la française », où tout le monde doit se fondre dans la population. Le modèle new-yorkais est communautariste et des populations entières de plusieurs milliers à millions de personnes se regroupent par affinité dans les quartiers : chinois, juifs, coréens, italiens, grecs, polonais, etc..
Il est donc possible de passer sa vie à New-York sans parler anglais et en ne côtoyant que des personnes de la même communauté. Pour exemple, ces publicités pour un diplôme universitaire taillé « sur mesure pour les Juifs orthodoxes » ou ces affiches pour des cours d’anglais (avez-vous déjà vu des affiches pour des cours de français en France ?).
Ainsi, c’est banal de le dire, la culture new-yorkaise est cosmopolite comme aucune autre, les rayons de supermarché et les food-trucks sont là pour vous le rappeler !




New-York, c’est aussi le « 9/11 » (« 11 septembre » en écriture US). Concernés au premier chef avec deux Boeing écrasés contre les tours du World Trade Center et ses milliers de victimes, la ville s’est évidemment relevée mais le quartier porte encore les marques de la catastrophe.
On débarque sous terre par le métro à la station « World Trade Center » flambant neuve. Une fois sortis du dédale de couloirs souterrains, on arrive dans un hall immensément vide, couvert de marbre blanc et s’élançant vers le ciel par de grandes poutres blanches de béton. Le toit du hall, l’Oculus, est un œil de verre en amande regardant vers le ciel, vers le nouveau gratte-ciel « One World Trade Center ». Ce building a été construit pour remplacer les deux tours effondrées. Il toise le reste de la ville du haut de ses 500m.


En lieu et place des deux tours, deux grands gouffres carrés en marbre noir d’une vingtaine de mètres de profondeur, sur le pourtour desquels s’écoulent un filet d’eau, aspiré par un autre gouffre au centre dont le fond est invisible depuis la surface. Ces gouffres sont protégés par des parapets sur lesquels ont été gravés les noms de chaque victime des attentats. Quand vient la date de l’anniversaire d’une de ces victimes, une rose blanche est déposée à côté de son nom, sur le parapet.





C’est indéniablement émouvant de se retrouver à l’endroit même où plusieurs milliers de personnes ont trouvé la mort en quelques minutes, au nom de la folie de quelques-uns, et d’imaginer l’état du quartier après que deux tours de 500m de haut se soient effondrées.

Néanmoins, toute cette saine émotion est entachée d’une certaine gêne vis-à-vis du produit commercial que constituent les attentats du 11 septembre : projet immobilier de plusieurs immeubles à venir, musée mémorial à 24$ l’entrée par personne…   

Difficile de trancher entre le devoir moral de mémoire et le business as usual dans un des centres financiers les plus dynamiques au monde, en plein cœur de Manhattan.



Pour finir avec un peu plus de légèreté, nous vous proposons une visite en image de New-York à dos de vélo.



Après avoir suivi la route des migrants à New-York, l’heure est venue pour nous d’opérer notre grande transhumance vers le Far West américain, un périple de 4000 km qu’on a choisi, fainéants de nous, de faire en train pour pouvoir profiter pleinement des Montagnes Rocheuses.

A bientôt pour un prochain article, à travers Chicago, les plaines du Midwest et les canyons du Colorado !







Plein d'autres photos, dans l'album dédié ici et sur la page principale du blog. 

3 commentaires:

  1. Magnifique la traversée de Claire sur le pont de New york.Ouf elle a évité le gentil écureuil bizzzzzzzzz

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  2. Tu auras du buter ce sale nuisible ! J'ai bien rigolé, sauf pour la police Comic Sans MS ... :p
    Vous êtes bien bronzés ! Bisous

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  3. Ne t'inquiète pas, on en a vu plein d'écrasés sur les routes, niark niark niark...

    La police, c'est du "Noteworthy Bold", quelle grave erreur d'appréciation ;) !

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