mardi 8 janvier 2019

Californie – balade sauvage dans l’intérieur – du 12 au 21 octobre


Quoi de mieux pour rendre hommage à ce pays que de louer un monstre de 4x4 pas sobre du tout en essence ? Le Chevrolet Suburban change de la Fiat Panda ! Au départ c’était pas notre idée, nous voulions notre traditionnel mini-van, celui dans lequel nos vélos rentrent debout sans démontage. Mais voilà, ce modèle est aussi très prisé par les asiatiques en visite sur l’Ouest américain, et cette concurrence a été la plus forte.





Notre 4x4 est gros et pas forcément pratique, mais l’engin a le mérite de pouvoir contenir les vélos et de servir de camping-car avec un peu d’aménagement.


Et, par-dessus tout, on le verra plus tard, une grosse voiture avec des parois en dur, c’est bien quand un ours devient un peu trop curieux…
   


Direction donc l’intérieur des terres, le désert, les montagnes de la Sierra Nevada et les séquoias !

On prend la direction de Sacramento, qui est la capitale de l’état de Californie, à 200km dans l’intérieur des terres. De la ville nous ne verrons rien, à part une autoroute de nuit et des zones commerciales, faute de temps.  On arrive de nuit à Colfax à notre premier camping après une descente sinueuse difficilement négociée avec notre tank. On peine à trouver un emplacement, on se fait « héberger » par un gars qui dort la nuit dans son pick-up (il nous avait pris pour les flics avec notre grosse voiture). Le camping sera gratuit pour nous. Au matin, on se rend compte qu’il s’agit plutôt d’un campement sinistre de vieilles tentes et de vieilles bagnoles plutôt qu’un camping. 

Le village de Colfax est lui par contre des plus typiques : une voie de chemin de fer centrale, et des magasins avec des façades en bois ou en brique de part et d’autre. C’est drôle, cette voie de chemin de fer est justement sur la ligne Chicago- San-Francisco, la même ligne qu’on avait prise en juin pour traverser le pays (nous on s’était arrêté à Salt Lake City) : souvenir, souvenir…





Lac Tahoe, Lac Mono : c’est le décor de la Sierra Nevada 

Quelques heures d’autoroute nous mènent sur les rives d’un autre joyau californien : le Lac Tahoe. Le lac a été formé il y a quelques millions d’années par des coulées de lave, et les batailles ont été ardues pour conserver son eau convoitée par les agriculteurs et les touristes. Aujourd’hui, on se croirait autour du lac d’Annecy, l’eau cristalline, les chalets de luxe et les montagnes en fond de toile. 






On est à 2000m d’altitude, mais on n’en a pas l’impression, du moins en journée. Il y fait bon, les pistes cyclables autour du lac donnent de jolis points de vue sur la forêt qui troque doucement son vert contre les couleurs d’automne. La nuit, c’est une autre histoire, on apprendra à nos dépens que les températures y frisent le négatif…



Avec la nourriture pour quelques jours stockée dans la voiture et cette température, il est probable qu’une grosse bestiole nous ait pris pour un frigo sur roulettes. En effet, après notre réveil en sursaut dans la nuit par un bref cognement sur la carrosserie, au matin, de grosses empreintes de pattes parsèment le tour de la voiture. Notre œil commence à être aguerris après plusieurs mois passées dans le monde sauvage américain, ces traces de pattes n’appartiennent ni à un raton-laveur, ni un putois, ni un cougar, c’est bien plus gros que ça…On n’a pas envie de savoir comment cela se serait passé si on avait dormi dans la tente !

Qui a posé ses papattes toutes sales sur la carrosserie ?

On poursuit notre route autour du Lac Tahoe, après un crochet dans le Nevada et sa capitale Carson City (une oasis de casinos en béton, de verdure et de climatisation dans un désert), on met le cap au sud sur la route 395 à travers de beaux paysages encore bien arides de collines pelées où de rares villages éveillent notre curiosité : comment et pourquoi les gens vivent ici ? Plus pour l’or a priori, car il existe une ville fantôme dans les parages, qui a compté une population de 10000 habitants à son apogée, avant de disparaître une fois les filons aurifères plus assez rentables.


Le désert : ses centres commerciaux, ses panneaux publicitaires...



Au détour d’un col, on surplombe enfin Mono Lake, une étrange étendue d’eau circulaire vieille de deux millions d’années, et dont les eaux sont plus salées que la mer. Des sources d’eau très minéralisées remontent par dessous le lac, créant des rochers de tufs blanc au milieu des eaux. 


Dans les années 1960, la rivière alimentant ce lac a été partiellement détournée pour alimenter en eau la ville de Los Angeles quelques centaines de kilomètres plus au sud-ouest, le niveau du lac a donc dramatiquement chuté, exposant encore plus ces monticules de tufs, pour le plus grand plaisir des touristes !



Ramassis de mouches mortes sur les rives (on n'a pas goûté)

Trop radins pour dépenser 23$ dans un camping qui avait pour seul intérêt de proposer une douche (payante!), on choisit l’option camping presque sauvage gratuite de la Forêt Nationale d’Inyo, sur les hauteurs du Mono Lake pour passer la nuit. Cette Inyo n’a de forêt que le nom, puisqu’on se retrouve au milieu d’une lande de buissons de sauge, avec quelques rares pins pour nous cacher. L’emplacement est presque idéal : vue sur la montagne, plein de bois pour faire du feu, pas de lumière parasite pour observer les étoiles et la voie lactée…mais encore une nuit bien fraîche. 




Vous allez dire : « ils vont dans la montagne en octobre, il fallait bien qu’ils s’attendent à avoir froid ! ». Certes, mais la chaleur du désert voisin nous a trompée. On ne sait pas si notre petit thermomètre-gadget Décathlon qui indiquait -4°C au matin dans la voiture était bien juste, mais ce qu’on sait, c’est qu’il y avait du givre sur les vitres intérieures ! Heureusement, nous avions anticipé cette fois, en dormant avec trois couches sur nous et notre toile de tente et bâche de sol par-dessus le duvet.



Le paysage montagneux au matin de ce 15 octobre est le cadeau d’anniversaire parfait pour Aymeric.


La bouillie quotidienne d'Aymeric ornée d'une bougie à l'occasion de ses 24 ans

On gravit sans difficulté le millier de mètres de dénivelé du col Tioga, porte d’entrée d’un des plus célèbres parcs nationaux américains : Yosemite (prononcer « yosémiti »). Ce parc est un plaisir pour les yeux, avec ses énormes dômes de granite joufflu se laissant tendrement éroder par le passage du temps. Quelques fois, les anciens glaciers ont fait un énorme travail en sculptant des falaises grises de plusieurs centaines de mètres, dans lesquelles le soleil couchant prend plaisir à se refléter, enflammant les parois rocheuses à la tombée du jour.




Evidemment, on a envie de rester dans ce parc quelques jours pour profiter de toutes ces merveilles…sauf que, naïfs que nous sommes, on n’est pas les seuls dans ce cas ! L’ultime emplacement disponible de tous les campings du parc nous file entre les doigts à 5 minutes près (rageant, les personnes faisant la queue juste devant nous dans la file d’attente l’ont obtenu), alors, faisant contre mauvaise fortune bon cœur, nous redescendons dans la vallée en changeant nos plans : on ne verra pas plus de Yosemite, mais on verra les Sequoias ! 


La nuit sera passée à Mariposa, bourgade confidentielle qui a le mérite de posséder un très bon camping avec un très bon Wifi. Notre dernière semaine sur San Francisco se profilant à grande vitesse, Internet est notre meilleur ami pour dégoter un hébergement et on se rend compte que le réseau Warmshowers ne nous aidera pas cette fois-ci (une seule des dix personnes contactées a daigné répondre à notre demande, la réponse étant négative), alors on se décide une bonne fois pour toutes à réserver des nuits via AirBnB, solution beaucoup plus décente économiquement que les minables dortoirs d’auberge de jeunesse à 70€ par nuit !

Après quelques provisions faites à l’improbable marché fermier dans la ville de Clovis (probablement du nom du premier roi mérovingien de Californie) dans la vallée centrale, on remonte donc dans les montagnes de la Sierra Nevada en direction des Parcs Nationaux de Kings Canyon et Sequoia. Comme on passe de 200m à 2300m d’altitude, on a le temps de voir le paysage changer : des plaines jaunies où paissent quelques maigres vaches en passant par les cultures et vignes irriguées de la vallée, on monte petit à petit à travers les forêts de chênes, puis on retrouve les pins sur le granite.







Kings Canyon et Sequoia National Parks : bienvenus au pays des géants !

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Une fois là-haut, on se trouve un emplacement de camping plutôt convaincant où l’on décidera de rester trois nuits, au milieu des dalles de granite et des pins, et avec plein de bois à brûler pour faire chauffer notre eau. Une partie de cette région forestière est classée « forêt nationale », ce statut autorise d’y camper théoriquement (plusieurs emplacements « officiels » sont néanmoins identifiés en bord de route pour éviter les intrusions sauvages de véhicules dans les zones sauvages) où l’on veut mais avec un permis de feu de camp dans les règles !


Cherchez notre bolide



Les parcs de Kings Canyon et de Sequoia sont accolés l’un à l’autre et ont la particularité d’abriter les arbres les « plus gros du monde ». Alors, qu’on soit clair, ce ne sont pas les plus grands, ni les plus épais, ni les plus vieux au monde, mais les plus gros si l’on tient compte du volume de bois qu’ils contiennent... Analogie toute américaine, on nous explique que si une voiture avait un réservoir d’essence du même volume que l’un de ces arbres, alors cette voiture pourrait faire 350 fois le tour du monde avec un plein. On est d’accord, la comparaison est pour le moins tirée par les cheveux et de belles photos parleront mieux que toutes les métaphores. 

"General Sherman tree" (pour ceux qui ont fait allemand ou qui ont tout oublié, tree=arbre en anglais), les américains aiment bien donner des noms de militaire à tout ce qu'ils trouvent, même aux arbres, il faut rester dans le masculin et le viril!


La surface en pavés sur la photo à la même aire que l'emprise au sol du General Sherman tree



"General Grant tree", encore un nom de militaire. Faites la guerre, on donnera votre nom à un arbre!

Ceci n'est qu'une branche de séquoia tombée au sol
Ces arbres ont une écorce très résistante au feu, et les nombreux tannins de leur bois les rendent très peu vulnérables aux parasites, alors ils ont tout le loisir de vivre longtemps, jusqu’à plusieurs milliers d’années.



Quand cet arbre a germé, la Terre était encore plate et Dieu n'avait pas encore de fils


Cône de séquoia


Ces arbres sont tellement gros qu’ils sont devenus des bêtes de foire. En 1891, un séquoia géant (nommé le « Mark Twain ») est ainsi tombé pour la science puis a été débité en morceaux avant de se faire trimbaler dans le pays. Arrivés sur la côte Est, les gens ont crié au canular tellement les morceaux d’arbres qu’on leur présentait paraissaient trop gros pour être vrais : deux sections des souches de ce « canular californien » sont encore exposées à New York et Londres.

Un vieil arbre mort qui brûle, c'est un incendie qui renouvelle la forêt autour. C'est beau la Nature!

Un jeune pin bien ridicule à côté de ses pairs séquoias


Comme on l’avait vu dans le nord de la Californie avec les autres géants que sont les Redwoods, l’homme ne s’est pas privé de faire tomber les plus gros sujets pour rafler un maximum de bois en un minimum d’effort. Ceci explique toutes les énormes souches d’arbres plusieurs fois millénaires tombés jusqu’à la fin du 19èmesiècle et encore présentes aujourd’hui. Heureusement, le bois de séquoia n’étant pas d’une grande qualité, et l’Homme s’étant rendu compte de la valeur patrimoniale de ces arbres, des groupements se sont mobilisés et ont lutté pour faire arrêter le massacre assez tôt et renverser la vapeur en créant les parcs nationaux voués à leur protection.



Ceci est une seule et même souche d'un séquoia abattu au 19ème siècle (Aymeric a failli perdre un genou pour cette stupide photo, un peu de respect SVP)


Deux français de souche

Lac artificiel d'Hume, avant et maintenant. Le barrage est toujours là, mais la scierie a disparu et la forêt a repris ses droits.



Après une soirée de camping des plus stressantes à South Fork en raison :
  • des 5km sur un chemin pourri avec une voiture de location qui n’est pas assurée pour la conduite sur chemin ;
  • de la tarentule grosse et poilue traversant tranquillement le-dit chemin et qui indique qu’on pourrait trouver ses sœurs dans le coin ; 
  • des ours croisés plus tôt sur le bord de la route en train de se gaver de glands dans les forêts de chênes, et le fait que, ô surprise, notre camping est justement au milieu des chênes.


On aurait pu lui rouler dessus avec notre gros 4x4, mais on a eu peur pour les pneus


"des champs de coton, dans ma mémoire"
Grosse botte de coton compacté après moisson

Hummm... c'est pour qui la bonne poussière (et le bon steak)?


Notre dernière nuit de camping à Saratoga sera l’occasion de discuter avec un californien fan d’escalade sans corde (le « bouldering »), qui nous apprendra que le rocher de Fontainebleau est a priori internationalement connu pour être l’origine de la discipline. On ne se refuse pas un cocorico.





Cette fois le mélange d’odeurs d’urine, de cannabis et de friture est formel, nous sommes revenus dans une grosse ville ouest américaine ! San Francisco s’offre à nous pour une semaine entière ! 

Suite et fin des aventures de Claire et Aymeric au pays des burgers dans un prochain (et presque ultime) article (après on vous laisse tranquilles) !



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