jeudi 7 juin 2018

Côte Est, sur la route de la Big Apple – de Washington D.C. à Jersey City – du 21 au 25 mai

Nous avons réussi à quitter l’agglomération de Washington par l’ensemble de pistes cyclables indépendantes longeant la rivière Anacostia et son réseau de canaux pour rejoindre Baltimore. Cet itinéraire nous avait été conseillé par
nos hôtes Warmshowers du soir, Chad, sa compagne Jowita et leur petit Emil. 



Chad nous a raconté ses histoires du temps où il était étudiant à Paris en 2004, sans un sou, un été, prétextant être muet et s’appeler Vladimir, son étude consistait à observer le comportement des gens dans un contexte touristique (musée, monument), et leur réaction face à un SDF ou un événement inhabituel. Il nous a ressorti l’écriteau « Pour survie » qu’il a utilisé pour mendier et a conclu que le moment de la journée le plus propice au don de la part des touristes était juste avant le repas de midi (rendement de 8€/heure). 
Autre sujet d’études, il se postait au musée du Louvres non loin de la Vénus de Milo, faisait tomber des raisins par terre par sa poche trouée (!), et observait le comportement des gens face à cette découverte. Nous avons beaucoup ri. Si parmi nos lecteurs parisiens, certains ont rencontré le semeur de raisin au Louvres ou Vladimir au pied de Montmartre, faites-nous le savoir !
Si vous lisez cet article et que vous souhaitez faire ou reprendre des études, on espère que cet exemple de stage vous aura donné des idées sur le panel de choses utiles à faire à l’université.

Nous avons atteint la ville de Baltimore par le sud en « serrant les fesses », les maisons délabrées, les carcasses de voitures et l’ambiance de ghetto n’étant guère rassurantes avec nos gueules de métèques européens. La ville de Baltimore est située au centre de l'État du Maryland, au confluent de la rivière Patapsco et de la baie de Chesapeake, qui donne sur l'océan Atlantique. 



Les quartiers ouest et nord sont des alignements de vieilles maisons en bois identiques exceptée leur couleur, mais qui tombent malheureusement en ruines pour certaines. Un quart des habitants de Baltimore vit sous le seuil de pauvreté. (Nous n'avons pas sorti nos appareils photo dans ces quartiers-là).
Le centre-ville est très animé dans le quartier des affaires au milieu des gratte-ciels et du côté du port, qui est un des plus grands ports de la côte Est. La ville essaie aujourd’hui de se redresser des crises industrielles passées grâce à de nombreux projets de rénovation urbaine comme dans son port intérieur et grâce à sa culture.


L’étape suivante nous mènera sur les côtes de l’Atlantique, à Carpenter Point, après une étape mémorable marquée par la pluie, une crevaison, une route 2*2 voies avec « piste cyclable » nous ayant donné quelques sueurs froides, et enfin un pont sur cette même 2*2 voies, a priori ouvert aux vélos compte-tenu des panneaux de signalisation leur étant adressés, (même si on a considérablement ralenti le trafic), et à la fin duquel une femme nous a alpagués pour nous dire que ce pont est interdit aux vélos en semaine, et qu’il faut qu’on passe au péage comme tout le monde (8$/ vélo pour un pont d’1,5km – on a essayé de négocier mais nous n’avons pas trouvé d’oreille assez attentive à nos arguments), puis le soir, un camping cher avec des emplacements pour tente uniquement situés dans une zone détrempée. La seule note positive de la journée est, qu’après un numéro de charme et « des yeux de chat potté » (tapez ça sur Google si vous n’avez jamais vu Shrek), Claire a pu négocier de poser la tente sous un abri à pique-nique du camping : nuit sur du béton, mais nuit au sec avec une jolie vue sur la mer !





Dommage pour la météo pluvieuse, car la côte du Maryland et la baie de Chesapeake sont plutôt coquettes avec ses petits ports de pêcheurs de crustacées et ses villas à fleur d’eau.



Le lendemain a été l’occasion de passer par 3 états différents : le Maryland, que nous quittions, la Pennsylvanie, où nous arrivions, et le Delaware, pendant quelques miles. Pour la petite histoire, le Delaware est un petit état sans intérêt, sauf qu’il a une réglementation fiscale très favorable et est donc un paradis fiscal reconnu !
Autre petite histoire de notre court passage dans le Delaware : en attendant notre sandwich dans un petit restaurant très fréquenté de bord de route, Claire a discuté quelques minutes avec un retraité du milieu pétrolier (portant un T-Shirt blanc, c’est important), qui « aurait rêvé de voyager comme nous ». Au moment de payer notre sandwich, alors que le retraité en question était déjà parti après nous avoir adressé un bienveillant « safe travel », la caissière nous indique que notre repas avait déjà été pris en charge par « l’homme au T-shirt blanc »…On n’aura pas eu l’occasion de le remercier. Bel exemple de générosité désintéressée. 




Après quelques détours, des routes fermées, des routes étroites et empruntées en pleine heure de pointe et un final stressant sur une nouvelle 2*2 voies (avec son officielle « piste cyclable »), nous arrivons chez Ira et Alesia à Media, dans la banlieue nord-ouest de Philadelphie, en Pennsylvanie. Une fois encore, l’hospitalité d’Ira et Alesia à travers le réseau Warmshowers nous aura permis d’en connaître un peu plus sur cette petite, mais néanmoins très active bourgade de 5 000 habitants.

Media est « la première ville équitable des USA », et est une ville en transition. Cela signifie que cette ville et ses citoyens mettent en place des réseaux, des évènements et des structures afin d’améliorer la ville pour son approvisionnement en nourriture, la production de son énergie, la gestion de ses déchets, la durabilité de son économie, et la solidarité entre ses habitants. Cela se concrétise par l’existence d’un groupe actif de promotion du commerce équitable, d’un magasin gratuit fonctionnant sur la base du don et d’autres actions en ce sens impliquant la collectivité. 

L’autre intérêt de Media est son « Mercredi - dîner sous les étoiles / Wednesday - Dining under the stars» : organisé, comme son nom l’indique, les mercredis soir, et où les nombreux restaurants de la rue centrale sortent les tables dans la rue. Cela attire les gens des villes environnantes, dont Philadelphie, pour une joyeuse ambiance de fête populaire!






Le lendemain, Ira nous escorte à travers les raccourcis et les routes peu empruntées pour nous mener jusqu’au centre de Philadelphie.



Philadelphie est une ville dynamique (on a l’impression d’écrire cela pour la 22èmefois, mais il est vrai que beaucoup de villes de ce type montrent un dynamisme important, à en juger par les travaux en cours et les infrastructures neuves. Cela est probablement dû à la bonne santé et réactivité générale de l’économie américaine en cette période. En attendant la prochaine crise…) où les gratte-ciels poussent comme des champignons autour d’un hôtel de ville monumental mais déjà plusieurs fois dépassé par ses compères de verres et d’acier. 



« Phillie », pour les intimes, est historiquement importante car c’est dans cette ville qu’a été signée la déclaration d’indépendance des USA le 4 juillet 1776 (libération du joug britannique). 
Autre élément historique, c’est à Philadelphie que Rocky Bolboa, une des légendes de la fiction américaine a vu le jour. Les films Rocky (1, 2, 3, 4, 5 !) le montrent en train de s’entraîner dans la ville des années 1970, et notamment gravir quatre à quatre les marches de l’escalier du Musée d’Art. Pour commémorer cet événement cinématographique, une statue de Rocky est présente au pied des marches. Et évidemment, lors de notre passage, nous avons pu croiser quelques Rocky junior en puissance faisant des pompes après avoir monté les escaliers en courant. Tout y était : sueurs sur les muscles chauds, puissance et précision du geste sportifs, virilité du mouvement. Un grand moment de cinéma américain sous nos yeux embués d’émotion.



Passons l’ironie et remontons encore un peu plus loin sur la côte Est, direction Trenton. Partis tard de Phillie, et devant arrivés tôt, c’est en train que nous passons de Philadelphie à Trenton. Comme d’habitude, l’équation train+vélo=aventure est à nouveau vérifiée, malgré théoriquement une acceptation de nos vélos dans ces trains. Sauf que nos vélos ne sont pas des vélos ordinaires, et que, transportant nos vies dessus, leur maniabilité en est sacrément réduite ! Après un premier train loupé faute de place, le deuxième train nous accepte (ou plutôt, « on monte dans le train et on voit ce que disent les contrôleurs »), on fait comme on peut pour tenir avec des passagers très peu réceptifs à notre problème de place, puis on se fait débarquer à l’arrêt suivant, puis rembarquer par l’arrière du train par un contrôleur quelque peu excédé mais toutefois aidant. La prochaine fois, on prendra un vélo pliable avec un caleçon de rechange pour seules affaires !

Les campings ne courant pas les rues dans ces zones urbaines de Pennsylvanie, c’est encore chez un hôte Warmshowers que l’on passe la nuit à Trenton. 
Wills, notre hôte trentenaire, vient d’emménager dans sa maison des quartiers populaires de la ville. C’est une grande maison avec des dépendances pour qu’il puisse s’adonner à sa passion de création de vélo, dont le tall-bike, un concept artisanal de vélo possédant deux cadres l’un sur l’autre. C’est assez inutile et dangereux (une chute d’un de ces vélos a valu quelques mauvaises fractures à un de ses amis), cela donne une belle allure dans les quartiers populaire certes, mais au moins il sait souder des cadres et bricoler tout ce qu’il veut avec des vélos ! 



Wills est aussi engagé dans une association de formation d’adolescents au métier du cycle : le jeune monte lui-même son propre vélo avec l’aide des formateurs, et fait aussi un peu de commerce dans un magasin. Enfin, Will intervient aussi dans l’école de cirque de la ville pour les aider à réparer leur parc de monocycles.
Bref, ce mec est parfait.

Pour le coup, contrairement à la ritournelle habituelle, la ville de Trenton n’est ni jeune, ni dynamique. C’est une vieille ville d’aciérie qui a écrit une belle page de l’histoire industrielle américaine, en fondant dans ses usines les câbles métalliques des ponts suspendues les plus prestigieux des USA (notamment un câble de 10km de long d’un seul tenant, fondu en continu et stocké sur un train – ndl : information libre de droit pour placement dans une conversation). 
La crise industrielle est passée par là, les boulots sont partis en Asie, et la ville s’est peu à peu étiolée. Un nouvel élan économique semble prendre, mais cela risque d’être long. Il est déjà possible d’apercevoir des jeunes type hypsteremménager dans des lofts en briques rouges et fenêtre métalliques géantes au sein d’anciennes usines du centre-ville.

Trenton s’enorgueillit discrètement d’être le lieu historique de la première victoire du général Washington durant la guerre d’indépendance (avant d’être le premier président américain et, en tout humilité, de donner son nom à la capitale, Washington a été un meneur d’homme hors-pair durant la guerre d’indépendance). On dit que les ennemis en question, des prussiens qui se battaient pour le compte des anglais, étaient bien imbibés au moment de la bataille, et que la victoire fût aisée. 

Notre route vers le nord-est est l’occasion de prendre le chemin de halage d’un vieux canal datant de l’âge d’or industriel de la ville, le Delaware et Raritan Canal. Nous devions initialement reprendre un train, mais Wills nous a convaincu du contraire et il a eu raison (il est vraiment parfait ce mec !).





On arrive à Princeton (état du New Jersey), dans une ambiance tout autre, car il s’agit d’un des campus universitaires les plus prestigieux des Etats-Unis (donc du monde). La ville de Princeton date de 1683, soit la préhistoire pour les américains. 



On y rencontre Kim, Romain et Ethan, une triplette de Français installée aux USA pour le travail (l’expérience professionnelle d’Ethan est assez courte, il est né au mois de mai). Kim, amie de lycée de Claire vient donc de donner naissance à Ethan (poids et taille à la naissance sur demande uniquement). Romain est chercheur en écologie/microbiologie et d’autres mots en « -logie », un sujet difficile à expliquer en quelques lignes. 
On passe l’après-midi sur les pelouses parfaites du campus, au milieu des bâtiments historiques de l’université, à nous moquer des étranges us et coutumes des américains, avant de reprendre un train régional en direction de Jersey City, dans le New Jersey, aux portes de New-York ! 


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